Selon les experts, elle permettrait à l’Etat de résoudre les principales menaces à la digitalisation des services financiers.
Si les innovations digitales se présentent comme une opportunité pour un système financier plus inclusif, elles s’accompagnent également d’un certain nombre de menaces. La principale est celle liée à la principale est celle liée à l’insécurité associée à leur utilisation. Selon Cyril Okoroigwe, Chief executive officer (CEO) of Regtech Africa, les data étant aujourd’hui considérées comme une mine d’or expose les clients à de nombreux risques. « Les institutions financières et même les agents non financiers font régulièrement l’objet d’attaques de la part des hackers soit généralement pour vol de données personnelles, soit pour fraudes financières », déplore-t-il.
L’autre menace est l’instabilité financière. En effet, la généralisation de l’utilisation des innovations digitales dans le secteur financier encourage des comportements spéculatifs. Ils sont susceptibles, d’après les experts financiers, d’emballer les marchés et déboucher sur l’instabilité, voire des crises financières. Pour les participants à la première édition des Journées scientifiques de l’économie numérique (Jsen) organisée par le Cnef, les dangers induits par ces innovations rendent nécessaires l’évolution et l’adaptation de la réglementation pour encadrer les activités du système financier camerounais.
LES AStuCES DE L’uNCDF à L’EtAt CAmErouNAIS
Selon Marie Sudreau, représentante du Fonds de développement du capital des Nations unies (Uncdf), l’open banking est une opportunité pour le Cameroun. Cependant, « elle soulève d’importantes questions de politique économique liées à l’innovation, à l’accessibilité des services bancaires, au respect de la vie privée, à la concurrence et à la structure du secteur financier. Dans le contexte du Cameroun, il est important de se poser les questions suivantes: Dans quelle mesure l’écosystème financier actuel du Cameroun est-il prêt à échanger ses données en termes d’environnement règlementaire ? Quelles seraient les institutions prêtes à échanger leurs données en toute sécurité? Et quelles données ? Les pratiques actuelles de capture de données peuvent-elles perdurer et, si oui, faut-il un cadre réglementaire adapté? La réponse à ces questions pourrait servir de base pour déterminer une stratégie de partage des données financières à court, moyen et long terme », suggère-t-elle.
Par ailleurs, il est essentiel pour un pays souhaitant mettre en place son régime d’open-banking d’identifier son objectif principal et d’imaginer la structure règlementaire idéale pour atteindre cet objectif. L’établissement d’une phase pilote avec quelques institutions financières et établissements de paiement et un choix réduit de données essentielles pourrait constituer un point de départ.
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Louis Paul Motaze, ministre des Finances, président du Cnef
« Le secteur financier joue un rôle crucial dans le développement d’une Nation »
Le secteur financier joue un rôle crucial dans le développement d’une Nation. Il permet de canaliser l’épargne vers l’investissement, de financer les entreprises et les ménages, et de faciliter les échanges commerciaux. Un secteur financier solide et efficient est indispensable pour une croissance économique durable et inclusive. Au cours des deux dernières décennies, l’essor rapide des technologies digitales a considérablement contribué à la création des richesses et à l’amélioration du bien-être des populations à travers le monde. Selon la Banque mondiale, l’économie digitale représente déjà près de 20% du PIB mondial et devrait dépasser les 25% dans moins de 7 ans. Cependant, cette contribution est beaucoup plus faible dans les pays en développement. Au Cameroun, la contribution de l’économie digitale au PIB reste modeste. Elle tourne autour de 5% selon le ministère des Postes et télécommunications (Minpostel). Ce retard s’explique par des insuffisances qualitatives et quantitatives au niveau des infrastructures et du capital humain. Bien que l’on puisse considérer que ce rythme est lent par rapport à son potentiel et à l’évolution observée dans d’autres pays, le système financier camerounais s’est progressivement transformé grâce à l’utilisation des innovations digitales notamment les technologies de paiement. L’une des plus inclusives est le mobile money qui offre la possibilité aux populations d’accéder à divers services tels que les transferts d’argent, les paiements en ligne, les microcrédits, et autres. Bien entendu, des efforts restent à faire pour le rendre plus inclusif au Cameroun.
Minette Libom li Likeng, ministre des Postes et télécommunications
« L’écosystème des startups peut révolutionner le marché financier »
L a vision stratégique pour l’intégration continue des technologies innovantes au sein du tissu digital national de manière générale et du système financier de manière spécifique doit se concentrer, au-delà de la construction d’infrastructures robustes, sur le renforcement de l’éducation numérique à tous les niveaux, et l’instauration de mesures incitatives afin d’attirer les entreprises, en vue d’un écosystème financier inclusif et innovant, ainsi que sur la mise en place d’une réglementation adaptée, pour une intégration réussie des technologies digitales dans les services de paiement. Et pour ce faire, la promotion de l’innovation, le renforcement et le soutien des initiatives locales, notamment celles menées par les start-up camerounaises sont indispensables en vue de la mise en place d’un tissu entrepreneurial du numérique. Il s’agit notamment de la mise en place d’incubateurs et d’accélérateurs spécialisés, de la facilitation de l’accès au financement, de subventions pour la recherche et le développement, et même d’allègements fiscaux. L’écosystème des startups, particulièrement dans le domaine de la fintech joue en effet, un rôle transformationnel en introduisant de nouvelles idées et technologies qui peuvent révolutionner le marché financier.