Le ministère des Finances organise un échange avec les opérateurs économiques le 13 février 2025 à Douala, pour mobiliser les ressources de financement des projets d’investissement public.
« La mobilisation de l’épargne locale pour financer les projets de développement ». C’est autour de cette thématique que Louis Paul Motaze, le ministre des Finances, va mener des discussions avec les opérateurs économiques et les institutions financières le 13 février 2025 à Douala, afin de leur présenter le programme de mobilisation des ressources destinées au financement des projets d’investissement inscrits dans la loi de Finances de l’exercice 2025.
Le budget de l’Etat pour l’année 2025 promulgué en décembre dernier s’élève à 7 317,7 milliards de Fcfa, soit 7 250,8 milliards de Fcfa pour le budget général et 66,9 milliards de Fcfa pour les Comptes d’Affectation Spéciale (CAS). Le budget d’investissement public est de 1 863,1 milliards de Fcfa, en hausse de 16,1% par rapport à 2024. Les recettes nettes de l’Etat s’élèvent quant à elle à 5 507,7 milliards de Fcfa, tandis que ses dépenses cumulent à 5 615,5 milliards de Fcfa. Il en ressort un déficit budgétaire de 107,8 milliards de Fcfa.
Outre ce déficit budgétaire qu’il faut couvrir, l’Etat doit recourir à plusieurs formes de financements extérieurs pour combler ses besoins de trésorerie estimés à 1795 milliards de Fcfa pour cet exercice. Pour cela, les experts de la Direction générale du Trésor au Minfi, prévoient de recourir aux tirages extérieurs sur prêts-projets de 840 milliards de Fcfa, aux émissions des titres publics de 380 milliards de Fcfa, au financement bancaire d’un montant de 220,6 milliards de Fcfa, aux appuis budgétaires découlant du Programme économique et financier (PEF) avec le Fonds monétaire international (FMI) d’un montant de 165 milliards de Fcfa, ainsi qu’aux financements exceptionnels de l’ordre de 189,4 milliards de Fcfa.
L’équipe de Louis Paul Motaze entend au cours des échanges, convaincre ses interlocuteurs à souscrire aux émissions des titres publics de 380 milliards de Fcfa et au financement bancaire d’un montant de 220,6 milliards de Fcfa prévus cette année. Dans l’ensemble, selon les prévisions budgétaires, le Cameroun compte lever 1 130 milliards de Fcfa sur le marché des titres publics de la Beac, dont 750 milliards de Fcfa sous forme de Bons de Trésor assimilables (BTA) (6 à 12 mois d’échéance) et 380 milliards de Fcfa d’Obligations du Trésor assimilables (OTA) qui couvrent des échéances allant de 2 à 10 ans.
Un engouement croissant des pays de la Cemac
Outre le Cameroun, les autres pays de la Cemac vont solliciter le marché des titres publics de la Beac pour près de 4000 milliards de Fcfa en 2025. L’engouement des Etats sur ce marché est croissant au fil des années depuis 2018. Face à cette forte demande sur ce marché, les taux d’intérêt sur les titres connaissent une tendance haussière depuis 2022, ce qui accentue la concurrence entre les six États de la Cemac qui concourent sur ce marché. Bien que certains Etats offrent des taux d’intérêt prohibitifs pour obtenir des souscriptions, le Cameroun propose des taux modestes en mettant en avant les avantages de solvabilité, de flexibilité de son Trésor et du respect des échéances de remboursement des titres.
Cependant, la capacité du marché à absorber ce volume d’émissions reste incertaine. En janvier dernier par exemple, les premiers signaux de difficultés de l’année 2025 se sont annoncés sur ce marché. Lors de la première semaine de cotation de l’année, quatre États de la Cemac ont sollicité le marché pour mobiliser 110 milliards de Fcfa, mais seulement 32 milliards de Fcfa ont été obtenus, ce qui illustre la prudence ou la méfiance des investisseurs. Mais il y a surtout le souci du respect de la règlementation instaurée depuis deux ans par la Cobac sur ce marché.
La mesure de la Cobac
La Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) a renforcé ces dernières années la mesure visant à limiter l’exposition des banques au risque souverain. Désormais, les prêts et investissements bancaires en titres publics de certains États sont pondérés jusqu’à 100%, augmentant ainsi le coût du refinancement des établissements de crédit. Cette mesure, qui vise à préserver la stabilité du système bancaire, complique davantage l’accès des États aux ressources du marché régional.
L’exposition des banques au risque souverain dans la Cemac est passée de 10% en 2015 à 31% en 2023, ce qui suscite des inquiétudes quant à la soutenabilité du modèle actuel de financement des États par le secteur bancaire. Par conséquence, les établissements de crédit, qui jouent un rôle central sur le marché des titres publics en tant que spécialistes en valeurs du Trésor (SVT), adoptent une posture plus prudente.