Approuvé par la Commission de surveillance du marché financier de l’Afrique centrale (Cosumaf), le nouveau règlement de la Bourse des valeurs mobilières de l’Afrique centrale (Bvmac) a été adopté par son Conseil d’administration lors de sa session du 24 avril 2025. Ce document de 237 articles apporte des modifications au niveau des conditions d’admission des membres et les règles de fonctionnement du marché boursier applicables, aux intermédiaires de marché, aux émetteurs d’actifs financiers et aux autres membres de marché. L’objectif étant de stimuler la liquidité, sécuriser les transactions et attirer un plus grand nombre d’émetteurs et d’investisseurs en Cemac.
Déploiement opérationnelle: Digitalisation du processus de cotation boursière
Cette réforme peut se faire soit en fixing ou en continu selon le nouveau règlement général de la Bvmac
Dorénavant, la cotation des valeurs mobilières inscrites à la cote de la Bourse régionale (Bvmac) est assurée de manière électronique. La cotation électronique peut se faire soit par fixing ou en continu. La cotation au fixing se traduit par la confrontation de tous les ordres préalablement introduits par les sociétés de bourse dans le système de cotation électronique et, le cas échéant, par détermination d’un cours unique pour chaque valeur. Entretemps, la cotation en continu se traduit par la confrontation de tous les ordres au fur et mesure de leur prise en charge par le système de cotation électronique, et le cas échéant, par la détermination d’un cours instantané pour chaque valeur. Par ailleurs, l’article 14 du nouveau règlement de la Bvmac donne la latitude à cette institution d’assurer simultanément, ces deux modes de cotation électronique. « Dans ce cas, la répartition des valeurs entre chaque mode de cotation s’effectue selon des critères de liquidité qu’elle détermine par voix d’instruction sur la base du volume de transactions, le nombre de titres traités et celui de séances où la valeur a été traitée, ainsi que du nombre de contrats de liquidité enregistrés », stipule-t-il.
La Bvmac à la recherche d’une application adéquate
D’autre part, la bourse sous régionale s’est lancée dans la mise en route du projet relatif au fractionnement des titres cotés. Et en anticipation à la cotation en continue des valeurs, la bourse sous régionale entend se doter d’un processus de transformation digitale de ses processus de traitement des ordres. Raison pour laquelle, elle a lancé début mai 2025, un appel d’offres en vue de la sélection d’une entreprise devant lui doter d’une solution numérique appropriée (API) à cet effet. Elle lui permettra « de transmettre automatiquement les ordres reçus des sociétés vers le système de cotation comme par exemple, le NSC actuellement utilisé avec une modularité vers une éventuelle future plateforme », explique la Bvmac. Cette application est également supposée favoriser le dialogue avec les systèmes partenaires pour la confirmation post-marché, tout en permettant d’autres usages stratégiques comme la récupération des données de marché en temps réel, la production de graphiques dynamiques ou encore l’intégration avec des outils d’analyse et de vulgarisation entre autres.
Pallier aux risques à venir
Ce faisant, la Bvmac souhaite anticiper sur les risques à venir. Car en effet, le fractionnement des actions devrait entraîner une multiplication massive du nombre d’ordres reçus aux guichets des sociétés de bourse (SDB), rendant ainsi les processus manuels complètement obsolètes et considérablement risqués. De ce fait, en l’absence d’une solution automatisée, la Bvmac encourrait un risque opérationnel majeur qui se traduirait par des lenteurs de traitement des ordres reçus, des erreurs de saisie, des retards de transmission des ordres et en définitive, une perte de confiance potentielle des intervenants du marché. D’autre part, la structure veut devenir sponsor d’un processus de digitalisation et d’automatisation des processus impliquant un écosystème allant de l’investisseur donneur d’ordre aux banques teneurs de compte titres et espèces en passant par les sociétés de bourse et le dépositaire central unique (DCU), dans le cadre des prises d’ordre de bourse et des traitements en back office desdits ordres collectés tant dans le sens aller (investisseurs donneurs d’ordre-sociétés de bourse-banques teneurs de compte-plateforme de cotation Bvmac), que dans le sens retour (Bvmac-DCU-sociétés de bourse-banques teneurs de compte-investisseurs donneurs d’ordre).
Enfin, le nouveau texte consacre la répartition des valeurs entre chaque mode de cotation. Celle-ci sera révisée périodiquement et publiée dans le Bulletin officiel de la cote (BOC). Il revient alors à la Bvmac arrête le mode de cotation des titres lors de leur première introduction ou admission à la cote.
Cotation boursière: De nouveaux compartiments à la cote permanente de la Bvmac
Leur chiffre passe désormais de 2 à 5 avec l’introduction de ceux relatifs aux PME et aux organismes de placements collectifs (OPC).
Avec le nouveau règlement, la cote permanente de la Bvmac s’est enrichie de nouveaux compartiments. Jadis constituée de deux compartiments à savoir A (actions) et C-Obligataire, elle en compte désormais cinq. Il s’agit tout d’abord, du « compartiment A-Premium » pour les grandes entreprises. Il est réservé à la négociation des titres de capital des sociétés anonymes qui répondent aux critères d’ouverture au public, de taille, de performance, de liquidité et de transparence visés à l’article 74 du présent Règlement général susvisé, et dont la demande d’inscription a recueilli les avis favorables du Comité d’admission de la Bvmac. Le « compartiment B-Medium » pour celles de moyen calibre quant à lui, est ouvert à la négociation des titres de capital des sociétés anonymes dont la qualité de l’information, la taille et/ou la diffusion du capital, ne leur permettent pas d’accéder au « Compartiment A », mais répondent aux critères de transparence, de liquidité et de performance visés à l’article 77 du présent règlement.
D’autre part, le « compartiment E-PME » est ouvert à la négociation des titres de capital des petites ou moyennes entreprises, dont la qualité de l’information, la taille et/ou la diffusion du capital, ne leur permettent pas d’accéder au compartiment « Medium », mais répondent aux critères de transparence, de liquidité et de performance visés à l’article 80 du texte régissant les activités de la bourse régionale. En outre, « le compartiment D-OPC » est destiné à la négociation des titres émis par des Organismes de placement collectifs (OPC), ayant reçus l’approbation de la Cosumaf et l’avis conforme du Comité d’admission de la Bvmac. Enfin, le compartiment « C-Obligataire », est réservé à la négociation des titres de créance émis par les sociétés, les Etats et leurs démembrements, ou toute autre personne morale ayant reçu l’approbation du régulateur à travers du visa ou d’un enregistrement d’émettre des titres de créances, et dont la demande d’inscription a recueilli l’avis favorable du Comité d’admission de la Bourse régionale.
Par ailleurs, la possibilité est donnée à la Bvmac de créer des compartiments supplémentaires ou modifier ceux existants après autorisation préalable de la Cosumaf, au regard notamment de l’un ou plusieurs des critères suivants à savoir la capitalisation des instruments financiers ou la catégorie des instruments financiers, la catégorie des investisseurs (les capitaux propres de l’émetteur, son le chiffre d’affaires et le nombre d’exercices certifiés, le nombre minimum d’instruments financiers diffusés dans le public et le montant minimum des instruments financiers diffusés dans le public), ainsi que le secteur d’activité et la localisation géographique de l’émetteur.
Cote permanente de la Bvmac: Redéfinition des conditions d’admission des titres de capital
Elles sont définies par le nouveau règlement général de la Bourse régionale dans ses articles allant de 74 à 86.
Sont admissibles aux négociations sur le Compartiment « A – Premium » de la cote permanente de la Bvmac, les titres de capital de toute société anonyme répondant aux conditions suivantes : Disposer d’un capital social minimum de 100 millions de Fcfa entièrement libéré, présenter une capitalisation boursière à l’introduction égale ou supérieure à 10 milliards de Fcfa et diffuser dans le public au moins 20% du capital social si la capitalisation boursière lors de l’introduction est inférieure à 50 milliards Fcfa, 15% du capital social si la capitalisation boursière lors de l’introduction est supérieure à 50 milliards de Fcfa et inférieure à 100 milliards Fcfa, 10% du capital social si la capitalisation boursière lors de l’introduction est supérieure à 100 milliards Fcfa. Est également exigée, la diffusion dans le public à l’introduction, d’un minimum de 2 millions de titres, répartis entre au moins 200 actionnaires. Les critères de performance financière sont également de mise. Il va falloir présenter des états financiers certifiés par deux commissaires aux comptes agréés, des trois derniers exercices précédant la date de dépôt de la demande d’admission à la cote. Ils doivent être établis conformément aux normes comptables en vigueur et aux normes Ifrs. En outre, il faudra avoir connu au minimum deux exercices bénéficiaires net sur les trois (3) derniers et avoir distribué au moins un dividende sur les trois derniers exercices clôturés.
Sur le compartiment « B-Medium »
Sont admissibles sur le compartiment « B – Medium », les titres de capital émis par des personnes morales disposant d’un capital social minimum de 10 millions de Fcfa entièrement libéré, une capitalisation boursière à l’introduction d’au moins 05 milliards de Fcfa et une diffusion dans le public d’au moins 15% de son capital social dès l’introduction en bourse, ainsi qu’une quantité minimale de 500 000 titres repartis entre au moins 100 actionnaires. L’entreprise devra également présenter 03 années de comptes établis conformément aux normes comptables en vigueur et certifiés par un commissaire aux comptes agréé. Elle doit aussi connaître ou avoir connu au minimum un exercice bénéficiaire net, sur les trois derniers et avoir distribué au moins un dividende sur les trois derniers exercices clôturés.
Sur le compartiment E-PME
Sont admissibles sur le compartiment « E – PME » dédié aux petites et moyennes entreprises et industries, les titres de capital émis par des personnes morales disposant d’un capital social minimum de 10 millions de Fcfa entièrement libéré. Elle doit avoir employé au moins 10 personnes pendant les six derniers mois et présenter une capitalisation boursière à l’introduction de 300 millions de Fcfa. Il lui est également exigé un total bilan ne dépassant pas 10 milliards de Fcfa au titre du dernier exercice précédant la date de dépôt de la demande d’admission de ses titres à la Cote et distribuer dans le public au moins 15% de son capital social, tout en émettant les titres d’un montant minimum de 200 millions de Fcfa. L’admission au Compartiment PME peut être demandée par une société anonyme en cours de constitution par appel public à l’épargne (APE), et ce, après avoir obtenu un visa de la Cosumaf sur le document d’information élaboré dans le cadre de cette opération. Dans ce cas, la société doit présenter des perspectives de rentabilité étayées par des informations prévisionnelles sur trois années, assorties des hypothèses sous-jacentes. Ces informations prévisionnelles, établies sous la responsabilité du Conseil d’administration doivent être accompagnées de l’avis du Commissaire aux comptes.
Sur le compartiment des Organismes de placement collectif « D- OPC »
Peuvent être inscrits à la cote permanente de la Bvmac dans un compartiment distinct, les parts ou actions des Organismes de placement collectif (OPC) dûment agréés par la Cosumaf. La demande d’admission des titres des OPC (parts et actions) dans ledit compartiment, doit être accompagnée des états de synthèse de l’OPC du dernier exercice précédent la date de dépôt de la demande d’admission. Ils doivent aussi être accompagnés du rapport du ou des commissaires aux comptes relatif à la certification desdits états. A cela s’ajoutent les états de synthèse de l’OPC consolidés, le cas échéant, du dernier exercice précédant la date de dépôt de la demande d’admission, accompagnés du rapport du ou des commissaires aux comptes relatif à la certification desdits états, le cas échéant. Sont aussi exigée une copie de la décision d’agrément Cosumaf de l’OPC concerné et une copie du contrat de liquidité ou d’apport de liquidité, le cas échéant.
Innovation: Création du marché non-coté à la Bvmac
Peuvent y être échangés, les effets publics négociables issus de la titrisation de la dette intérieure des Etats de la Cemac, les titres de créances négociables, ainsi que les titres de capital et de créance de toute société anonyme non admis à l’un des compartiments de la cote permanente de la bourse.
Toutefois, la Bvmac peut organiser des transactions portant sur des valeurs non-inscrites à l’un des compartiments de la cote permanente susmentionnés. Dans ce cas, les transactions se déroulent dans des conditions d’organisation particulières en marge du marché officiel. Selon les dispositions de l’article 56 dudit règlement, « peuvent être échangés sur le marché du non-coté, les effets publics négociables issus de la titrisation de la dette intérieure d’un ou de plusieurs Etats de la Cemac, les titres de créances négociables (TCN) émis sur le guichet de la Banque des Etats de l’Afrique centrale (Beac) et les titres de capital et de créance de toute société anonyme non admis à l’un des compartiments de la Cote permanente de la bourse (Private Equity) ». A ces instruments financiers, s’ajoutent également des titres de sociétés non cotées faisant l’objet de vente judiciaire ou d’exécution en bourse pour défaut de libération ou pour non-présentation consécutivement à une opération de dématérialisation légale.
L’article 57 du nouveau règlement de la Bvmac quant à lui, dispose que selon le cas, la demande d’une offre concernant une valeur donnée peut être initiée par une collectivité émettrice dont les titres ne sont pas inscrits à un compartiment de la cote permanente. Ce privilège s’étend aussi à tout investisseur porteur de titres non-inscrits à un des compartiments de la Cote Permanente, qui souhaite céder ses titres à des acquéreurs potentiels. L’article 58 quant à lui, stipule que sur le marché du non-coté, les échanges sont effectués par confrontation multilatérale dans un carnet d’ordres central ou par confrontation bilatérale avec les intérêts d’une contrepartie identifiée, au libre choix de l’initiateur et selon les termes contractuellement fixés avec son intermédiaire. Les transactions effectuées par confrontation bilatérale sont réputées effectuées lorsque sont appariées l’instruction d’achat et l’instruction de vente correspondante. Les modalités d’organisation des transactions portant sur les valeurs non inscrites à la Cote sont précisées dans une instruction de la Bvmac.
Finance islamique: Admission des Sukuks comme titres de créance à la Bvmac
Ils sont admis au compartiment C-Obligataire au même titre que les obligations émises par les Etats, les institutions financières de premier rang et les entreprises publiques et privées.
Selon l’article 87 du nouveau règlement général de la Bvmac, les Sukuks sont considérés comme titres de créance au même titres que les obligations émises par les personnes morales, les Etats et les démembrements des Etats et les titres financiers assimilés, les obligations convertibles en titres de capital, ou tout autre titre financier donnant droit à une créance générale sur son émetteur. Les sukuks sont en effet, des certificats d’investissement islamiques, équivalents aux obligations dans la finance conventionnelle, qui permettent de financer des projets, des actifs ou des opérations financières. Ils sont conformes à la « Charia », la loi islamique, et offrent une alternative aux instruments financiers traditionnels pour les investisseurs musulmans.
En outre, l’article 88 du même texte stipule que peuvent être inscrits sur le Compartiment « C-Obligataire », les instruments financiers autres que les actions et les parts d’OPC, représentatifs d’une dette, émis par les Etats et leurs démembrements, les institutions financières régionales et internationales, les sociétés publiques et privées. Cette admission est subordonnée à un certain nombre de conditions : Pour les Etats et leurs démembrements (collectivités territoriales notamment), ils sont tenus d’émettre des titres de créance ayant une maturité minimale de 2 ans, présenter un dossier complet relatif à l’opération dûment revêtu d’un numéro d’enregistrement de la Cosumaf et s’engager à constituer toute garantie énoncée dans le document d’information avant l’admission des titres à la cote. Ils doivent aussi s’acquitter des droits d’admission à la cote dans un délai de 15 jours suivants la date de la cérémonie de première cotation.
Les conditions d’accès sur le compartiment C-Obligataire
Pour les institutions financières régionales et internationales comme les banques de développement, il est exigé la présentation d’un dossier complet relatif à l’opération dûment revêtu d’un numéro de visa de la Cosumaf, tout en s’engageant à constituer toute garantie énoncée dans le document d’information avant l’admission des titres à la Cote et s’acquitter des droits d’admission à la cote dans un délai de 15 jours suivants la date de la cérémonie de première cotation. Elles doivent aussi émettre des titres de créance ayant une maturité minimale de 2 ans.
Pour les entreprises publiques, il est exigé la présentation d’un dossier complet relatif à l’opération dûment revêtu d’un numéro de visa du régulateur du marché financier, de constituer toute garantie avant l’admission des titres à la Cote et émettre des titres de créance ayant une maturité minimale de 2 ans. Aux entreprises privées dont les grandes entreprises, il est demandé de disposer d’un capital social entièrement libéré, fournir les éléments comptables, comprenant notamment les états financiers de synthèse des trois derniers exercices, établis conformément aux normes comptables en vigueur; présenter des comptes annuels consolidés et certifiés lorsque la personne morale émettrice contrôle d’autres sociétés. Elles doivent émettre des titres de créance représentant au moins un montant de 200 millions de Fcfa ayant une maturité minimale de 2 ans. Aux PME, il est exigé un capital social entièrement libéré, les éléments comptables comprenant notamment les états financiers de synthèse des deux derniers exercices, établis conformément aux normes comptables en vigueur, ainsi que l’émission des titres de créance représentant au moins un montant de 50 millions de Fcfa ayant une maturité minimale de 2 ans.
D’autre part, l’admission des titres de créance donnant accès au capital d’un émetteur dont les titres de capital ne sont pas eux-mêmes admis aux négociations à la cote permanente est subordonnée à l’engagement, par l’émetteur, de présenter une demande d’admission sur le même marché des titres de capital concernés, dans un délai de 12 mois avant la prise d’effet du droit d’accès au capital de l’émetteur.
Source : Extrait de son intervention lors du Premier Talk Invest tenu en avril 2025 à Douala