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Les distorsions au cœur des problèmes des entreprises

D’après les enquêtes de conjoncture du Gicam, près de 80% des entreprises les identifient comme un obstacle important au développement de leurs activités.

«La concurrence fait partie des 10 problèmes majeurs des entreprises. Elle est aussi importante que les impôts, la fiscalité, etc. » Tels sont les propos du président du Groupement inter-patronal du Cameroun (Gicam), Célestin Tawamba. Il s’exprimait ainsi lors de la Journée de la concurrence organisée le 23 mars 2023 au siège du patronat à Douala.

Les distorsions de concurrence étant considérées comme une modification des conditions normales de la concurrence par le soutien financier ou réglementaire apporté à certaines entreprises par l’État, elles sont donc vues comme un goulot d’étranglement pour les entreprises. D’après le patronat camerounais, parmi les acteurs économiques qui se plaignent des distorsions de concurrence, il y a 61,1% des entrepreneurs du secteur agroalimentaire, 89,5% du secteur de commerce, 66,6% des banques et assurances, 55,5% du secteur de transport, 86,9% du secteur des services aux entreprises et 72,8% des autres services du secteur tertiaire.

cAUSeS et FActeUrS deS diStOrSiONS

Ces distorsions de concurrence dé- criées par les entreprises camerounaises sont entre autres causées par la « tolérance administrative » qui selon les enquêteurs, laissent prospérer le secteur informel, les effets pervers des lois visant à encourager l’investissement privé (notamment la Loi de 2013 fixant les incitations à l’investissement privé,ndlr), une application à géométrie variable de certaines réglementations (souvent du fait de la corruption ou des délits d’initiés), les conflits d’intérêt résultant de la prise de participation de certains hauts responsables de l’administration dans des entreprises privées ou publiques, les situations de monopole (notamment les monopoles de certaines entreprises publiques).

Au regard des causes soulignées par le Gicam, Lassina Traore, spécialiste des activités pour les employeurs au Bureau international du travail (BIT), ajoute par ailleurs que plusieurs facteurs entretiennent de telles distorsions de marchés et leur multiplication entraîne des ruptures de concurrence et une perte de compétitivité des entreprises et naturellement une aggravation du chômage et surtout du chômage des jeunes. Parmi ces facteurs, il cite entre autres : la multiplicité des acteurs qui exercent des activités de commercialisation de biens et services dans des formes et des lieux aussi divers que variés ; la persistance des situations de rente, des comportements à caractères oligopolistiques en plus des monopoles naturels ou de fait ; le poids important du secteur informel ; l’inefficacité des dispositifs de contrôle et de surveillance des marchés laissant prospérer des pratiques de commerce illicite (contrebande, contrefaçon, fraude) ; l’action des pouvoirs publics souvent sont considérées elles aussi comme sources de distorsions.

Ces causes et facteurs de distorsions se manifestent sous diverses formes sur l’activité des entreprises. D’après la Directrice exécutive du Gicam, Aline Valérie Mbono, les manifestations les plus importantes des distorsions sont : la concurrence déloyale, le commerce illicite (contrebande, contrefaçon, fraudes), les pratiques anticoncurrentielles (ententes, abus de position, concentrations), les pratiques commerciales interdites (tromperies, non respect des normes etc.), la violation de la réglementation sur la métrologie légale (ex: pratiques consistant à fausser les poids, prix et mesures), la spéculation commerciale provoquant des hausses injustifiées des prix, les pratiques commerciales discriminatoires visant à évincer certains concurrents du marché.

Lesquelles manifestations font dire à André Dumas Tsambou, économiste que : « 70% d’entreprises trouvent que la concurrence déloyale a un impact négatif sur le développement légal de leurs activités ». A l’en croire, les distorsions de concurrence ont aussi des conséquences sur la santé et la sécurité des consommateurs, les recettes fiscales de l’État notamment aux taxes et les droits de douane non perçus, l’environnement en termes produits toxiques éliminés illégalement dans la nature et les pollutions de l’air non réglementées.

miSe eN PLAce d’UN OBServAtOire de LA cONcUrreNce et de LA cOmPétitivité

C’est donc au regard de ces distorsions que le Gicam a mis en place l’Observatoire de la concurrence et de la compé- titivité (OCC). Sa principale mission est de contribuer à la réduction des distorsions de concurrence, afin d’améliorer la compétitivité des entreprises et l’attractivité de l’espace économique national. Dans le cadre juridique, l’OCC a pour objectif de recenser, documenter et analyser tous les facteurs et pratiques entraînant des distorsions de concurrence au niveau de l’économie. Dans le cadre de la formation et de la sensibilisation, l’observatoire doit contribuer au renforcement des capacités des dirigeants d’entreprises et de leurs personnels sur les moyens de mieux se prémunir contre les distorsions de concurrence. Il doit également produire un plaidoyer afin d’impulser des évolutions législatives et les pratiques administratives allant dans le sens du renforcement d’un climat de saine concurrence.

Les principales activités de l’OCC sont entre autres : le recueil et monitoring des préoccupations des entreprises ; les enquêtes et collectes d’informations ; l’analyse des textes règlementaires ; le benchmarking ; les rencontres thématiques ; les saisines des administrations ; l’Observation des pratiques et interventions administratives, pour ne citer que ceux-ci.

Toutefois, il faut noter que sur le plan opérationnel, de nombreux mécanismes et institutions se sont déjà mobilisés pour assainir les marchés et favoriser des conditions de saines concurrences entre les acteurs. Il y a lieu de citer à cet effet le ministère du Commerce qui est doté de compétences générales dans le contrôle des marchés, la régulation des prix et la lutte contre les pratiques considérées comme trompeuses, agressives, illicites ou anticoncurrentielles. Le ministère du Commerce s’appuie pour cela sur ses démembrements décentralisés et sur la brigade de répression de fraudes. La Direction générale des Douanes qui s’est dotée depuis quelques années d’un dispositif spécial appelé Halcomi (Halte au commerce illicite) ; l’Anor dont les compétences recouvrent le contrôle de conformité aux normes aussi bien à la porte (Pecae) que sur le marché interne ; le ministère des Mines des industries et du développement technologique (Minmidt) qui est actif dans le contrôle des établissements classés ; les administrations sectorielles qui, par le biais de licences et autres agréments, exercent des contrôles sur les Entreprises relevant de leurs secteurs d’activités respectifs.

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