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Le DG de l’Oapi moins explicatif

Appelé à s’expliquer face à la presse sur le climat délétère qui règne au sein de l’organisation et les accusations de mal gouvernance et de malversations financières dont il fait l’objet, le Directeur général Denis Bohoussou a subtilement contourné les questions des journalistes

Face à la presse nationale et internationale le 25 janvier dernier, le Directeur général (DG) de l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (Oapi), qui tentait de se blanchir quant aux accusations de « mal gouvernance et de malversations financières » entre autres dont il fait l’objet d’accusations, et qui ont d’ailleurs entrainé sa suspension de son poste pendant pratiquement deux mois (14 octobre-10 décembre 2021), n’a véritablement été convainquant. Certes éloquent quant à l’objet principal de la conférence de presse qui portait sur « les innovations du système de protection de la propriété intellectuelle de l’Oapi et leur impact sur le développement de l’entreprise », Denis Bohoussou a par contre été peu disert au sujet de la la crise qui mine depuis plus d’un an l’institutionpanafricaine. « Il s’agit d’une crise que l’Organisation a connu. Vous permettrez que je ne puisse pas rentrer dans les détails pour un certain nombre de raisons personnelles, mais je peux dire du point de vue du Directeur général que je suis, que les choses vont dans le bon sens », a lâché sans ambages Denis Bohoussou.

L’OBLIGATION DE RESERVE COMME ARGUMENT

D’après l’Ivoirien, tout semble donc aller pour le mieux malgré les soupçons de détournement de l’ordre de 397,3 millions de Fcfa qui pèsent sur sa gestion notamment pour les exercices 2018, 2019 et 2020. D’ailleurs, les premiers résultats de l’audit de gestion mené par le Cabinet Mazars Cameroun SA recruté le 5 novembre 2021 dans le but de clarifier ces suspicions, ont révélé que « l’audit réalisé a mis en évidence plusieurs opérations pouvant être assimilées à des actes anormaux de gestion ; plusieurs autres irrégularités et inexactitudes ; et des défaillances significatives du système de contrôle interne en place ».

Appelé par les hommes et femmes de médias à s’expliquer sur ces graves allégations portées contre lui, Denis Bohoussou a usé d’un savant subterfuge pour contourner la question. « Comme vous avez pu le constater, malgré tout ça, le conseil d’administration a décidé que le Directeur général reprenne son poste. Et donc, il appartient à chacun d’entre vous d’en tirer les conséquences. Connaissez-vous un conseil d’administration qui, après ces graves accusations, décide de demander au Directeur général de reprendre son poste ? Je ne ferai pas de commentaire », a-t-il déclaré en substance, non sans évoquer son obligation de réserve en tant que patron d’une organisation intergouvernementale. Une réponse peu convaincante, puisque comme l’avait déjà indiqué LFA dans édition 991 du 16 décembre 2021, M. Bohoussou a pu obtenir l’autorisation de réintégrer son bureau à Yaoundé dans le seul but de préparer sa défense, et d’apporter les preuves contradictoires au rapport d’audit dont la version définitive est attendue en mars prochain. D’ailleurs, depuis son retour aux commandes de l’Oapi, il travaille sous la tutelle d’un Comité ministériel composé de cinq administrateurs, qui « ont pour mission d’assurer le suivi de ses actes de gestion ».

CACOPHONIE AUTOUR DE L’ANNULATION DES ACTES

Autre sujet poignant abordé lors de la conférence de presse, la décision controversée du DG d’annuler divers actes portant sur la délivrance des titres de marques, leur renouvellement et les inscriptions dans les registres spéciaux y afférents, prises dans l’intervalle de sa suspension par le Directeur général adjoint (DGA) qui en assumait l’intérim. Pour se défendre sur la question, Denis Bohoussou a invoqué les textes de l’Oapi qui obligent selon lui, à retirer à chaque fois un acte signé par le DG, lorsque celui-ci comporte des insuffisances. « Si vous prenez les différentes annexes, dans l’un d’eux, il est dit que les titres de propriétés intellectuelles, une fois que les techniciens ont fini d’examiner la demande, sont délivrés par le directeur général, ou par un fonctionnaire dument désigné par le Directeur général », a lancé le DG. Et d’ajouter : « Quelqu’un vient contrefaire votre marque, vous saisissez le tribunal pour une contrefaçon, et puis le contrefacteur dit que c’est acte a été signé au moment où le Directeur général était suspendu. Est-ce que celui qui a signé avait qualité de le faire ? Le débat ne va plus porter sur la contrefaçon, mais sur la qualité de celui qui a signé l’acte. C’est en tenant compte de tous ces risques juridiques qu’on a dit, vaut mieux retirer ces actes et en produire des nouveaux de sorte que le titulaire soit rassuré. Je ne rentrerais pas sur les autres aspects ».

Un argumentaire qui s’inscrit à l’opposé de celui de l’Association des mandataires agréés auprès de l’Oapi (Amoapi). En effet, courroucée par cette décision du DG, cet acteur majeur du système de propriété intellectuelle de l’Oapi, a par la voie de sa présidente Me Régine Françoise Ekani Manga, saisi ce dernier par courrier en date du 30 décembre 2021, pour l’inviter instamment à revenir sur sa décision « qui pose un sérieux problème de légalité et d’opportunité (…) de nature à ternir davantage l’image de marque et la crédibilité de l’Oapi et de son système de protection ». C’est face au mutisme du DG que l’Amoapi a par la suite écrit deux semaines plus tard au chef de l’Etat camerounais Paul Biya, « afin que revienne la stabilité dans les activités de cette illustre institution qui jusqu’ici, faisait l’honneur et la fierté de tous ses acteurs ».

Egalement accusé de semer un climat de terreur au siège de l’Oapi à Yaoundé à travers les mutations de personnel, les velléités de licenciements collectifs et les résiliations de contrats, Denis Bohoussou a comme lors de ses précédentes interventions, adopté un discours faux-fuyant. Préférant plutôt appeler à l’apaisement dans la maison. « Je suis revenu au Cameroun le 24 janvier et j’ai découvert autant que vous que je faisais régner une terreur en mon absence (…) il n’est pas de la nature du Directeur général que je suis d’être violent, encore moins de façon verbale ou encore de façon physique. (…) Au sujet de la mutation des cadres, lorsque nous sommes revenus de Cotonou nous avons tenu une assemblée et j’ai demandé au personnel de d’oublier ce qui s’est passé. J’ai dit ceci, chacun d’entre nous doit faire son examen de conscience et en fonction de cet examen de conscience, prendre la résolution… », a-t-il- lancé entre autres.

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