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Le prix de la négligence des pouvoirs publics

Bientôt un mois que le prix du poulet connait une véritable flambée au Cameroun. Dans les grandes métropoles, notamment Yaoundé, Douala, Bafoussam et autres, il devient difficile pour les populations de se procurer cette volaille pourtant très prisée sur les tables des ménages. Les quantités se sont en effet raréfiées dans les marchés et autres espaces commerciaux. Et quand on en trouve, il faut mettre le paquet financièrement. Ainsi, pour les poulets de chaire d’à peine un kilogramme habituellement vendus entre 2000 et 2500 Fcfa, il faut débourser au moins 4000 Fcfa. Des animaux plus gros sont vendus jusqu’à 15000 Fcfa en fonction de leur poids. Quant aux pondeuses habituellement moins coûteuses, elles sont cédées à partir de 3000 Fcfa contre 1800 Fcfa auparavant. Les conséquences sont telles qu’il est devenu impossible de manger du poulet braisé ou frit en bordure de route à partir de 200 Fcfa le morceau comme c’était le cas il y a encore très peu de temps. Même lors des cérémonies, cet aliment a pratiquement disparu parmi les menus proposés aux convives.

Cette situation s’avère déplorable car après la grippe aviaire de 2017 qui a réduit de moitié le nombre d’emplois dans la filière ainsi que le cheptel national des poules pondeuses et de poulets de chair, l’aviculture camerounaise avait repris du poil de la bête.

Sur les raisons de cette flambée des prix, les opérateurs de la filière pointent un doigt accusateur vers la Covid-19 qui a obligé de nombreux pays à fermer leurs frontières commerciales. La crise sanitaire qui perdure depuis plus d’un an dans le monde, a ainsi perturbé les importations des intrants agricoles nécessaires à la production du poulet, entrainant de manière inéluctable l’augmentation des prix pour les éleveurs. C’est le cas des oeufs et des aliments qui entrent dans la composition de l’alimentation de cette volaille, à l’instar du soja qui a vu ses coûts croitre d’environ 20% à l’international. Et c’est pour remédier à cet état de choses que le ministre de l’Elevage, des pêches et des industries animales (Minepia), Dr Taïga, a adressé le 22 mars 2021 une correspondance à l’Ambassadeur du Cameroun au Brésil, pour autoriser l’importation de ces produits et sous-produits aviaires du Brésil. « Dans le cadre du développement de la filière avicole camerounaise et de la diversification des fournisseurs d’intrants, j’ai l’honneur d’accepter l’importation de produits et sous-produits aviaires du Brésil, dans le respect des exigences sanitaires et zoosanitaires du Cameroun et du Brésil, selon les normes de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE) avait écrit le Minepia. Malgré cette mesure, rien n’a changé jusqu’ici.

La pénurie de poulets avec pour corollaire la hausse des prix observée aujourd’hui au niveau du consommateur finale, est en réalité la conséquence directe du faible soutien apporté par les pouvoirs publics aux aviculteurs, très souvent abandonnés à eux-mêmes. Comme dans la plupart des secteurs d’activités agricoles porteurs, les producteurs camerounais sont confrontés au manque de financements qui constituent pourtant le noeud gordien de tout investissement. Le gouvernement a certes annoncé depuis plusieurs années la mise en oeuvre d’une politique de financement des activités avicoles à travers le Projet de développement de l’élevage (Prodel) et le programme d’Amélioration de la compétitivité des exploitations familiales agropastorales (Acefa). Mais jusqu’ici, la mayonnaise tarde à prendre véritablement.

En outre, comment comprendre que le Cameroun qui se veut être un exportateur de volailles et des produits dérivés à l’instar des oeufs dans la sous-région Afrique centrale et même au-delà, soit encore fortement dépendant des importations pour approvisionner les élevages locaux en intrants alors qu’il peut lui-même en produire ? En cas de crise sanitaire comme c’est le cas en ce moment, il est normal que la production en prenne un coup. Autre goulot d’étranglement déploré par les acteurs de la filière, l’absence de création d’un centre de formation technique pour les métiers de l’aviculture et la non disponibilité des marchés de volaille respectant les normes.

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