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Le rafistolage électrique du gouvernement camerounais

Malgré les multiples barrages de retenue d’eau et de production électrique de grande capacité construits et mis en service entre 2011 et 2019, le déficit énergétique du Cameroun reste toujours préoccupant. Le septentrion qui était énergiquement autosuffisant jusqu’à une époque récente, subit depuis un certain temps un délestage sans précédent. Au 15 novembre dernier, le taux de remplissage du barrage de Lagdo était seulement de 48%, du fait de la rareté des pluies. Un an au paravent, « au terme de la saison des pluies 2019, le taux de remplissage était de 105% », indique le gouvernement. Selon les responsables d’Eneo, l’entreprise en charge de la production et de la distribution de l’énergie électrique, il faut remonter à plus de 25 ans pour retrouver un taux de remplissage aussi bas du barrage de Lagdo. Du coup, les délestages sont devenus le lot quotidien des populations des régions du Nord, de l’Extrême-Nord et de l’Adamaoua.

Pourtant, c’est depuis le début de l’année 2017 que les autorités camerounaises étaient conscientes du fait que le barrage hydroélectrique de Lagdo ne pouvait plus alimenter à lui tout seul le Grand-Nord Cameroun. Cette unique centrale hydroélectrique sur laquelle repose le réseau interconnecté Nord, mise en activité en 1983, ne peut même plus atteindre sa capacité maximale de production qui est de 72 MW. Outre les effets du vieillissement, selon les experts, « il peut y avoir également un phénomène naturel, celui de l’ensablement », expliquait Basile Atangana Kouna, le ministre de l’Eau et de l’énergie (Minee) d’alors, le 29 mai 2017 sur le site de Lagdo. Les propos des experts montrent que le manque d’entretien du barrage de Lagdo contribue à aggraver ce déficit.

En 2018, Electricity Development Corporation (EDC) avait mené une étude de réhabilitation de cet ouvrage estimée à 100 milliards de Fcfa. Un appel d’offres avait même été lancé et plusieurs entreprises avaient souscrit. Mais depuis lors, c’est le black out total. Cette réhabilitation du barrage de Lagdo ne figure même plus dans le programme économique et financier du gouvernement pour l’exercice 2021 présenté à l’Assemblée nationale le 25 novembre dernier par le Premier ministre (PM) Joseph Dion Ngute. Plus grave, la solution alternative au problème d’énergie électrique dans le grand nord présentée en 2019 n’a plus été évoquée. En effet, le 29 novembre 2019, pour le même rituel devant les députés, le premier ministre Joseph Dion Ngute avait annoncé « la construction des centrales solaires dans certaines localités situées dans les régions septentrionales, notamment à Maroua, Guider, Ngaoundéré et Garoua pour une capacité totale de 75 mégawatts ».

Cette annonce faisait suite à la sélection par le gouvernement en 2019 du consortium comprenant Scatec Solar, Izuba Energy et Sphinx Energy pour financer, construire, exploiter et vendre l’énergie électrique produite par les centrales solaires de Guider et de Maroua d’une capacité respective de 10 et 15 MW, d’un coût d’investissement global de 14 milliards de Fcfa à l’issue d’un processus d’appel d’offres international lancé le 6 octobre 2017. La mise en service était prévue en 2020. L’année étant dans ses derniers jours, sans l’ombre d’une plaque solaire dans ces localités, le PM se trouve dans l’inconfort de pouvoir évoquer ces projets devenus fantômes. Et nos députés, peu outillés et peu renseignés, n’ont pas interpellé le gouvernement sur ces promesses non tenues lors des questions orales. Alors que sous leurs yeux depuis le 30 novembre, le gouvernement a trouvé la solution facile de démonter des équipements de la centrale d’Ahala, dans la banlieue de Yaoundé pour les transférer vers les villes de Garoua et de Ngaoundéré afin de renforcer l’offre énergétique dans le septentrion de 20 MW. A quand la fin du rafistolage au Cameroun ?

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