Vous êtes ici
Accueil > Dossiers > Pour une dynamisation des ports africains dans le commerce intercontinental

Pour une dynamisation des ports africains dans le commerce intercontinental

Il faut miser selon les experts sur le développement infrastructurel, la connectivité, la facilitation pour favoriser l’intégration économique.

Réunis à Douala du 21 au 22 octobre 2021, les acteurs du secteur des transports en Afrique ont partagé leur expérience, en vue de favoriser la dynamisation des ports africains et faciliter le commerce intercontinental. Avec l’entrée en vigueur de la Zone de libre-échange continentale (Zlecaf) qui se positionne sur un marché unifié de 1,2 milliard de personnes et un Produit intérieur brut (PIB) combiné de 3.000 milliards de dollars, les acteurs du secteur sont convaincus que les ports africains occupent une place de choix dans le développement du commerce intercontinental.

S’exprimant ainsi lors de la troisième édition du Forum des ports africain organisée à Douala 21 au 22 octobre 2021, Jan Hoffmann, chief, Transport section of Trade logistics branch à Unctad a déclaré : « le continent africain regorge d’un énorme potentiel. Nous devions miser sur nos acquis pour accélérer son développement. Je crois que la meilleure solution pour l’Afrique c’est la contribution. Une contribution du marché des biens, mais aussi du marché des services. Il faut une facilitation dans les échanges, les transports entre les différents pays d’Afrique ». Cette rencontre a donc servi de cadre de réflexion sur les différents enjeux liés à l’intégration économique en Afrique.

A la question de savoir comment renforcer le rôle des ports dans le commerce intercontinental, Dominique Lafont, CEO Lafont Africa Corporation, fait savoir qu’il faut miser sur les interconnexions. « Si on reste connecté en Afrique, on sera plus performants… même si certains pays demeurent très en retard en matière d’interconnexion », reconnait-il. Toutefois, le patron de Lafont Africa Corporation reconnait que la situation s’est beaucoup améliorée en Afrique au cours de ces 10 dernières années. Et le Cameroun est pris en exemple. « Le Cameroun est inspirant pour beaucoup de pays en Afrique. Car, il y a 15 ans, la situation n’était pas pareille. En plus, avec le port de Kribi, c’est une nouvelle ouverture à l’Afrique qui se présente… », a encore indiqué Dominique Lafont.

Barrières tarifaires

En Afrique, lors des rendez-vous liés au secteur du transport, la problématique des barrières tarifaires est toujours remise sur la table. Ce forum des ports africain n’a pas échappé à la règle. Au cours de son intervention, Dominique Lafont s’est également attardé sur une révision des barrières tarifaires dans l’optique de favoriser les échanges entre les différents pays.

Interpellé quant aux dispositions mises en place au niveau du Cameroun pour pour faire surmonter cette difficulté, Bertrand Mbolè Mbolè, Directeur des travaux d’infrastructures au ministère des Travaux publics (Mintp), a révélé que dans la stratégie du Cameroun, il y a également cette volonté de diriger les barrières tarifaires entre les pays. « Dans cette perspective, nous avons plusieurs postes de barrières publiques frontaliers qui sont exécutées entre le Cameroun et certains pays, dont le Nigéria… poste qui permet d’uniformiser les mesures douanières et faciliter les échanges entre nos deux pays… », a ajouté le haut responsable du Mintp.

Les corridors pour promouvoir l’intégration économique

Concernant le segment infrastructurel, les professionnels du secteur disent qu’il est également important de miser sur les corridors pour promouvoir l’intégration économique. « On doit aussi pouvoir s’appuyer sur les corridors (…) ce segment est indispensable dans le développement du transport en Afrique », précise Dominique Lafont. Au Cameroun, certains projets sont développés dans ce sens. « En termes de corridors de transport, nous avons beaucoup d’ambitions avec le corridor Douala-N’Djamena, Douala-Bangui (…) Toujours dans le développement du transport, nous avons envisagé une ligne ferroviaire, qui devrait nous permettre de relier le Cameroun et le Tchad. Nous avons prévu des chemins de fer, entre N’Gaoundéré et Ndjamena… Nous avons également dans le Sud du Cameroun des projets en cours et d’autres sont envisagés », a indiqué pour sa part Bertrand Mbolè Mbolè. Un corridor de transport est une structure multimodale composée d’axes routiers, ferroviaires, fluviaux ou encore aériens, fournissant alors une connexion économiquement efficiente entre des centres d’activités économiques d’une ou plusieurs zones enclavées d’un ou de plusieurs pays, à un pays voisin ayant un accès maritime. Pour la Communauté économique des nations unies pour l’Afrique (CEA), transformer les corridors de transport de l’Afrique centrale en corridors de développement globaux, est déterminant pour passer à la prochaine étape de développement et d’intégration de la région, notamment à l’aune du libre-échange en Afrique, même si cette proposition s’avère plus complexe et nécessite un engagement continu avec les États et les parties non-étatiques.

Au cours d’une réunion d’un groupe d’experts convoquée le 8 décembre 2020 par le Bureau sous-régional pour l’Afrique centrale de la CEA, Lot Tcheeko, responsable de la gestion des connaissances au Bureau de l’Afrique centrale de la CEA, a pris exemple sur le Corridor de développement de Maputo en Afrique australe. Selon lui, ce corridor est un exemple classique de ce que devrait être un corridor de développement. En effet, reliant le principal port et la capitale du Mozambique, Maputo, aux provinces de Gauteng, Limpopo et Mpumalanga en Afrique du Sud, le Corridor de Maputo est la destination de l’agro-industrie, de la valorisation minière, du raffinage du pétrole, de la fabrication de savon, de la fonderie d’aluminium et du transport d’électricité dans une production et une consommation intégrées, un pôle commerce et développement.

Même si ce n’est pas le même schéma en Afrique Centrale, les Etats marquent une volonté à favoriser l’intégration économique. Parmi les 12 projets intégrateurs enregistrés en zone Cemac, il est envisagé l’emménagement de cinq corridors régionaux reliant les six pays de la zone Cemac.

L’Afrique en matière en termes d’échanges intercontinentaux

En matière de développement et d’intégration régionale, l’Afrique centrale est encore très retard. Globalement, le continent africain a encore beaucoup à faire concernant les échanges. « L’Afrique est en effet très en retard, en matière d’échanges intercontinentaux. Le Commerce intra-africain, ne représente que 15% du total des échanges sur le continent, contre 67% pour les f lux commerciaux intra-européens. L’Essor du commerce intracontinental aura un double avantage pour attirer des investisseurs étrangers, ensuite de créer des débouchés. L’industrialisation de l’Afrique pour l’accroissement des chaînes de valeurs régionales est indispensable », a déclaré Jean Ernest Ngallé Bibehe, Ministre des Transports du Cameroun.

La troisième édition du Forum des ports organisé à Douala avait donc pour objectif d’entrevoir le rôle des ports africains dans la mise en oeuvre et la concrétisation de la zone de libre échange continentale dans le contexte économique incertain et notamment marqué par une crise sanitaire. Plus spécifiquement, les sujets liés au rôle évolutif des autorités portuaires dans la nouvelle vision de l’économie à la productivité et à la compétitivité des ports, aux enjeux du partenariat public-privé et concessions portuaires, ainsi qu’aux défis relatifs aux corridors et aux métiers qui permettront de mieux appréhender les différentes problématiques y afférentes ont été abordés.

REACTIONS

Jean Ernest Ngallé Bibehé, ministre des Transports
« Faire du secteur des transports, un secteur de développement économique »

A travers donc sa Stratégie nationale pour le développement 2020-2030, le Cameroun a fait le choix d’une transformation structurelle de son modèle économique pour faire face à ses défis. Celle-ci of frira la possibilité de transformation de nos matières premières et d’accélérer la mise en oeuvre d’une base industrielle pour répondre aux besoins de nos populations. L’ambition du Cameroun est donc de faire du secteur des transports un secteur de développement économique, un secteur de développement de solidarité nationale… un secteur de réduction des disparités. Aussi dans ce contexte, l’accent est mis sur l’emménagement des infrastructures portuaires, routières, aéroportuaires et ferroviaires. Tout ceci pour accompagner les projets porteurs… C’est dans cette perspective que sont menées les actions portées par les ports camerounais pour consolider son positionnement en Afrique centrale. Au regard des ambitions du gouvernement camerounais, il va sans dire que les résolutions et recommandations qui seront prises et issues des présentes assises feront l’objet d’une attention particulière.

Cyrus Ngo’o, directeur général du PAD
« Améliorer les performances opérationnelles »

En suivant cette dynamique de croissance, vous comprendrez que si on anticipe dans la transformation structurelle et les performances opérationnelles, bien évidemment vous vous retrouvez en danger. C’est donc pour cela que nous avons entrepris d’investir dans nos capacités d’accueil. Nous avons décidé d’investir dans la capacité de stockage de la marchandise parce qu’autant on évolue, vous avez les besoins des opérateurs. Vous avez un besoin tout aussi important qui est celui de la sécurité. C’est pour cela que nous avons entrepris de faire en sorte que notre port puisse répondre aux standards internationaux. Quand un navire arrive, il doit repartir en toute sécurité… C’est pour dire que la dynamique actuellement impulsée au port de Douala, est celle qui répond aux besoins du marché. Il y a d’autres types de besoins, qui commencent à prendre de l’ampleur, notamment le besoin de s’installer à proximité des lieux d’embarquement et de débarquement. A cela, vous avez évoqué la problématique des zones industrielles for tunes qui est une dynamique qui est entrain de prendre de l’ampleur, et nous sommes entrain de mener la réflexion parce que c’est un segment de l’industrie qui permet d’accroître nos capacités. Nous observons la dynamique des marchés et nous comprenons que si la croissance se maintient à un certain horizon, nous sommes obligés d’optimiser le port. Nous savons que d’ici 2030, nous serons partis de 13 millions à 24 millions et comme l’espace physique ne grandit pas suffisamment, nous cherchons toutes les voies qui existent pour augmenter les quais, les magasins, accroître le niveau de sécurité, etc. Nous sommes conscients qu’à l’horizon 2050, les 23 millions ne pourront pas suffire au port existant, il faudrait donc aller chercher ailleurs, donc nous avons deux dynamiques qui vont s’opérer en moyenne et à long termes. Dont, une dynamique qui consiste à améliorer l’infrastructure actuelle, améliorer les performances opérationnelles, ensuite celle à long terme sur la construction et l’aménagement d’une nouvelle plateforme.

Patrice Barthelemy Melom, directeur général du Port de Kribi
« Créer les conditions pour que les investisseurs puissent s’installer à Kribi »

Le Port autonome de Kribi (PAK) vient de se doter d’un site internet plus moderne, plus interactif, plus fonctionnel et destiné à être plus ergonomique afin de faciliter la navigation des internautes. Nous avons mené une étude, qui permet de développer le port de manière progressive dans toutes ces composantes. Et si je dois revenir sur certains projets, je dirais que le développement du port de Kribi se fait sur certains points stratégiques. Notamment sur le développement des capacités, des performances. A Kribi, nous avons commencé tout petit avec le terminal à conteneur et le terminal polyvalent. Sur l’axe stratégique qui permet de développer la zone industrielle : c’est d’abord le foncier ensuite il est aussi question de s’assurer que l’écosystème se met aussi en place. En termes de projets, nous travaillons sur l’aménagement d’une zone prioritaire de 500 hectares… il y a un autre axe qui consiste à développer la connectivité du port. Les volets sur lesquels on veut travailler, c’est créer toutes les conditions pour que les investisseurs puissent s’installer sur la place de Kribi. Je pense ici à un projet qui consiste à approvisionner l’ensemble du site en eau portable, celui-là est bien faisable… Il devrait s’activer au cours de l’année 2022. Nous devons également régler le problème de l’énergie … nous avons des projets tant pour le gaz (construction d’une centrale thermique) ces travaux devraient démarrer pour l’année 2022. Nous avons également des solutions en même temps sur les projets qui devraient coûter un peu moins chers. Il y a un certain nombre de projets qui devraient permettent au port de Kribi d’accroître ses capacités, et ensuite de faciliter la présence des investisseurs sur la zone industrielle et puis d’insérer le port dans cet environnement et dans certains projets… »

Dr Louis Eboupeke, directeur général de l’Autorité portuaire Nationale (APN)
« Une activité conforme »

L’Autorité portuaire nationale accompagne toutes les places portuaires au Cameroun dans la dynamique que nous relevons en ce moment, et qui a été suffisamment martelé par le PAD et le PAK. Nous devons nous assurer que l’activité que mènent ces ports est conforme aux standards internationaux exigés par tous les codes en vigueur dans le domaine portuaire. D’ailleurs, ce forum coïncide avec la visite que j’étais entrain d’effectuer dans la zone portuaire ou le site portuaire de Douala, pour m’assurer véritablement que les mesures qui sont édictées par les pouvoirs publics et la réglementation internationale dans le domaine portuaire sont respectées. Nous les accompagnons et nous veillons à ce que tous ces codes soient pour la sécurité.

Laisser un commentaire

Top