Vous êtes ici
Accueil > Fenêtre > Les curiosités de la sanction infligée du DG de la Cnps

Les curiosités de la sanction infligée du DG de la Cnps

La politique de l’auto destruction des dirigeants camerounais qui se démarquent dans leur manière de gérer la chose publique a jeté son dévolu depuis le mois de mai 2024 sur Alain Mekulu Mvondo Akame, l’actuel directeur général (DG) de la Caisse nationale de prévoyance sociale (Cnps). En effet, à la suite d’un audit de gestion mené à la Cnps sur la période 2008-2016 par le ministère délégué à la présidence de la République chargé du Contrôle supérieur de l’Etat (Consupé), cette institution a produit le 17 décembre 2019 un rapport d’audit dans lequel le DG a été reconnu coupable de 19 fautes de gestion, dont 16 fautes avec un «préjudice financier non évaluable» et trois fautes avec un «préjudice financier évaluable». Par la suite, il a été traduit devant le Conseil de discipline budgétaire et financière (Cdbf) du Consupé en août 2020. Le 7 mai dernier, un arrêté de la ministre en charge du Contrôle supérieur de l’Etat sanctionne le DG de la Cnps à payer les 609,5 millions de Fcfa en plus d’une amende de 2 millions de Fcfa, soit un montant global de 611,5 millions de Fcfa.

Intéressons-nous aux trois fautes avec un «préjudice financier évaluable » qui s’élèvent à 609,5 millions de Fcfa. Dans le détail, il s’agit de l’ordonnancement et la perception, au titre de gratification de fin d’année, d’un montant de 3,5 millions de Fcfa, la liquidation et l’ordonnancement des dépenses de 514,5 millions de Fcfa octroyés aux membres du Conseil d’administration de la Cnps par le Conseil d’administration lui-même, au titre d’indemnités de surveillance et enfin, des écarts et manques à gagner relevés dans le reversement des intérêts sur les dépôts à terme bancaires (DAT) de 91,5 millions de Fcfa soit un total de 609,5 millions de Fcfa.

Nous relevons plusieurs curiosités dans le traitement de ce dossier. Le rapport du Consupé a été produit en décembre 2019 et le DG de la Cnps est passé devant le Conseil de discipline budgétaire et financière (Cdbf) du Consupé en août 2020 pour s’expliquer. La sanction tombe le 07 mai 2024, près de quatre ans après son passage devant le tribunal du Consupé. Pourquoi seulement maintenant ? Ensuite, est-ce que « la gratification de fin d’année » de 3,5 millions de Fcfa a été perçue seulement par le DG ? Si non, pourquoi le personnel à qui on a alloué aussi la gratification ne rembourse pas ? Comment se fait-il que le remboursement des 514,5 millions de Fcfa «octroyés aux membres du Conseil d’administration de la Cnps par le Conseil d’administration lui-même, au titre d’indemnités de surveillance », est imputé au DG ? Le Consupé a certainement la liste des membres avec les montants perçus. Pourquoi ne pas les inviter individuellement à rembourser ? Enfin, sur « les écarts et manque à gagner relevés dans le reversement des intérêts sur les dépôts à terme bancaires (DAT) ». Comptablement parlant, les intérêts bancaires sur les DAT sont virés dans le compte de l’organisme placeur. Est-ce que le DG les perçoit en espèce avant de reverser dans les comptes ?

Cette chasse aux sorciers engagée contre l’un des meilleurs managers des entreprises publiques du Cameroun nous rappelle l’histoire de Zacchaeus Mungwé Forjindam, l’ancien directeur général du Chantier naval et industriel du Cameroun (Cnic), qui avait écopé en 2012 de la prison à vie pour détournement de deniers publics de 206 millions de Fcfa. Dans la décennie 2000, il était le meilleur gestionnaire d’entreprise publique cité par deux fois par le président Paul Biya dans son discours de fin d’année. Son malheur est venu de la rumeur qui le présentait Premier ministre. Il avait pourtant réussi à transformer la Cnic, qui au départ était un service du Port de Douala, en entreprise rentable de plusieurs milliards de Fcfa de revenus annuels constitués à 95% de devises payés par des armateurs étrangers. Depuis son arrestation, le Cnic n’est plus que l’ombre de lui-même malgré plusieurs restructurations à coup des milliards d’impôts des citoyens. Pauvre Cameroun qui tue ses compétences !

Laisser un commentaire

Top