C’est cette importante fortune que l’administrateur directeur général de la Société nationale des hydrocarbures (SNH) aurait engagé dans une opération sans l’aval de l’Etat qui est l’actionnaire unique de cette société. L’information est contenue dans le communiqué sanctionnant le Conseil d’administration extraordinaire de la société tenu le 24 juillet dernier au Palais de l’unité à Yaoundé sous la houlette de Ferdinand Ngoh Ngoh, président dudit Conseil et par ailleurs ministre d’Etat, Secrétaire général de la présidence de la République.
Le principal fait marquant de ce Conseil d’administration aura été le rejet du rapport d’exécution du budget, ainsi que des comptes de la SNH pour l’exercice clos le 31 décembre 2023. Et pour cause, le rapport présenté par le Commissaire aux comptes en ce qui concerne le fonctionnement de la SNH sur la période mentionnée, a intégré l’opération de rachat de 10% des actions jadis détenues par la société Savannah Energy dans le capital de la société Cotco S.A. qui exploite le pipeline Tchad-Cameroun. L’on se souvient en effet que l’opération conclue le 19 avril 2023 pour un montant de 26,8 milliards de Fcfa, avait engendré de nombreux remous qui ont lourdement miné les relations entre le Cameroun et le Tchad.
En effet, une crise diplomatique était née entre le Tchad et le Cameroun à la suite de cette opération, au point où N’Djamena avait rappelé son ambassadeur au Cameroun en avril 2023 « pour consultation ». Le pays de Mahammat Idriss Deby Itno n’avait en effet pas vu d’un bon œil le rachat par l’Etat du Cameroun à travers la SNH, des parts de Savannah Energy dans le capital de la société Cotco S.A, arguant que son voisin avait pactisé avec une société que le Tchad rejette. Et pour mieux comprendre, il faut remonter à la genèse de cette histoire. En décembre 2022, la société américaine Exxon Mobil qui assure le transport du pé- trole tchadien jusqu’à Kribi au Cameroun avait annoncé avoir vendu ses parts à la société britannique Savannah Energy. Sauf que le gouvernement tchadien qui s’était réuni par la suite en conseil extraordinaire des ministres le 27 mars 2023, n’avait pas approuvé cette opération de vente, estimant que Savannah ne « dispose pas de capacités ni de garanties demandées par le Tchad ».
On ne peut pas comprendre comment la SNH advienne encore à intégrer cette opération de rachat après tous les tumultes observés, surtout que le 13 juin 2023, le Conseil d’administration avait décidé de sursoir l’opération. C’est ainsi que le communiqué qui sanctionne le Conseil d’administration extraordinaire indique que ce rachat « n’a été ni approuvé par le chef de l’Etat, ni par le Conseil d’administration ». Si le chef de l’Etat et le président du Conseil d’administration de la SNH qu’est le ministre d’Etat, secrétaire général de la présidence ne sont pas au courant d’une telle transaction qui porte sur 26,8 milliards de Fcfa, ça veut dire que l’administrateur directeur général de la SNH, Adolphe Moudiki, a pris sur lui d’engager le Cameroun sur cette importante opération sans l’aval de ses supérieurs hiérarchiques. A-t-il autant de pouvoir ou se base-t-il sur sa proximité avec le chef de l’Etat pour prendre un tel engagement foulant au pied toutes les règles de gestion. Et dans tout ça il reste en poste. Il y a-t-il un capitaine à bord du bateau ?
