L’écrivain camerounais Achille Mbembe vient de réaliser une énorme prouesse en remportant le prestigieux prix Holberg – cousin norvégien du Nobel pour les sciences humaines et sociales. Cette distinction internationale qui lui permet de décrocher la mirobolante somme de 530.000 euros (347,6 millions de Fcfa) est remise chaque année à un chercheur en lettres et sciences humaines, en sciences sociales, en sciences juridiques ou en théologie. Achille Mbembe a été désigné lauréat parce qu’il a réussi à influencer de façon décisive les recherches internationales à travers ses œuvres. « En tant qu’historien et philosophe politique, Mbembe s’est montré très préoccupé par l’enchevêtrement de l’Europe et de ses anciennes colonies. Utilisant l’Afrique comme point de départ d’une pensée en continuité avec
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Achille Mbembe, chercheur camerounais et professeur d’histoire et de science politique à l’université du Witwatersrand Johannesburg, sur la récurrence des coups d’Etat dans les pays sahéliens, In RFI.
Je crois que ces coups d’État sont l’expression d’un grand basculement. Le cycle historique, qui avait été ouvert au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, qui avait conduit à une décolonisation incomplète, ce cycle historique est terminé. L’Afrique est entrain de rentrer dans une autre période de son histoire, une période qui sera longue et qui entraînera d’énormes bouleversements. Qu’est-ce qu’il en sortira? Il est très difficile pour le moment de le savoir.
Achille Mbembé, historien camerounais, coordonnateur du rapport des treize propositions remis à Emmanuel Macron, sur la nouvelle relation entre l’Afrique et la France, In Financial Afrik.
Certaines relations sont abusives, voire irréparables. Dans de telles situations, il faut avoir le courage et l’intelligence d’y mettre un terme. J’estime pour ma part qu’il existe d’importantes ressources dans l’histoire des rapports entre l’Afrique et la France qu’il est possible de mobiliser pour construire ensemble un futur différent du passé et du présent. Ce n’est tout simplement pas vrai que l’ensemble de notre passé commun a été inutile et n’a servi à rien. Ceci dit, réparer une relation aussi asymétrique que celle-ci exige vérité, justice et égalité. Il y avait un risque de guerre civile en Afrique du Sud à l’époque de Mandela, alors que le rejet de la France aujourd’hui dans une grande partie de l’Afrique repose sur
Achille Mbembe, écrivain camerounais et Pr à l’Université de Johannesburg sur le rôle de la Suisse dans la déchéance de l’Afrique, In le journal suisse Le Temps.
Je ne fais pas partie de ceux qui souhaitent dicter la conduite de la Suisse. Je fais simplement un constat. La Suisse a une grosse part de responsabilité dans le drame qui se joue au Cameroun. Grâce à son système bancaire et par le biais des transferts illicites qui y transitent, elle participe à l’appauvrissement du continent africain. Une partie importante des capitaux qui devraient contribuer au développement de l’Afrique transitent par la Suisse et sont reversés dans des réseaux qui encouragent la violence sur le continent.
Achille Mbembe, historien camerounais, sur le choix porté sur lui par Emmanuel Macron pour préparer le prochain sommet Afrique-France, In RFI.
Je suis tenté de dire que c’est d’abord par curiosité intellectuelle. Le président Emmanuel Macron m’a demandé de jouer un rôle d’accompagnement auprès des nouvelles générations, avec lesquelles il veut tenter de redéfinir ce qu’il appelle « les fondamentaux de la relation entre l’Afrique et la France ». C’est un combat pour lequel nous militons depuis près de soixante ans. La proposition du président Macron est suffisamment ouverte, pour que l’on puisse contribuer à la définition du contenu de cette nouvelle relation. J’ai trouvé que c’était un projet nécessaire, raisonnable, que la mission était une mission de bon sens, que l’Afrique devrait pouvoir y trouver son intérêt, ce qui me semble être le cas.
Achille Mbembe, historien et politologue camerounais, sur l’antisémitisme, In Jeune Afrique.
Toutes les mémoires de la Terre sont indispensables à la construction d’un monde commun. Tous les peuples n’ont pas seulement droit à la mémoire. Toutes les mémoires disposent d’un droit égal à la reconnaissance et à la narration. Seule cette solidarité entre toutes les mémoires de la souffrance humaine nous permettra de relancer, sur une échelle planétaire, les combats contre l’antisémitisme et toutes les formes de racisme.
Achille Mbembe, historien et politologue camerounais, sur le nouveau modèle de développement de l’Afrique, In Jeune Afrique.
Il faut en effet repenser de fond en comble la question fondamentale du bien-être collectif ou, si l’on veut, du développement. La croissance économique et matérielle ne saurait, à elle seule, justifier autant de dégâts. En tant que projet historique de transformation, le développement en Afrique doit être fondé sur une conception élargie de la santé, celle des êtres humains et, avec eux, celle de toutes les autres composantes du vivant. Ni le vieux modèle occidental, ni sa version chinoise ne permettront au continent de briser les chaînes de l’appauvrissement. La prospérité et le bien-être ne sont pas synonymes de ponction indéfinie des corps humains et des richesses matérielles. Ils sont affaire de qualité des liens sociaux, de sobriété et