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Péril sur l’Intégration et le développement en Afrique

Le Niger, le Mali et le Burkina Faso ont créé la surprise le 28 janvier 2024, en annonçant conjointement leur retrait de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cedeao). « Après 49 ans d’existence, les vaillants peuples du Burkina Faso, du Mali et du Niger constatent avec beaucoup de regret, d’amertume et une grande déception que leur organisation s’est éloignée des idéaux de ses pères fondateurs et du panafricanisme », ont souligné les trois militaires au pouvoir dans ces pays dans un communiqué. Le Capitaine Ibrahim Traoré du Burkina, le Colonel Assimi Goita du Mali et le Général de brigade Abdourahamane Tiani du Niger, n’ont d’ailleurs pas hésité à accuser l’organisation d’être « sous influence des puissances étrangères » et de représenter une « menace pour ses Etats membres et ses populations dont elle est censée assurer le bonheur ».

En réalité, cette décision est la conséquence directe de la détérioration des relations entre ces trois « alliés » tous situés à l’ouest de l’Afrique, et l’instance communautaire qui œuvre au développement économique de ses pays membres tout en jouant un rôle crucial dans la gestion des conflits régionaux. En effet, à la suite des coups d’Etat qui ont porté des militaires au pouvoir dans chacune de ces trois nations ces dernières années, l’organisation a ordonné le rétablissement de l’ordre constitutionnel à chaque renversement de régime, non sans essuyer le refus des hommes en tenue. Un bras de fer qui a malheureusement entrainé des sanctions tout d’abord contre le Mali qui a subi en août 2020 la fermeture de ses frontières aériennes et terrestres, avant de se voir imposer un embargo sur les échanges financiers et commerciaux, à l’exception des produits de première nécessité. Le Burkina Faso a pour sa part été suspendu purement et simplement de la Cedeao, tandis que les militaires au pouvoir au Niger se sont vu interdire de voyager dans l’espace communautaire, en plus des sanctions économiques imposées au pays, aggravant de ce fait l’insécurité alimentaire sur l’ensemble du territoire.

Malgré de nombreuses rencontres au sommet organisées par la Cedeao pour assouplir le climat de tension et les différentes missions dépêchées dans ces pays, les choses n’ont pas évolué. Bien au contraire !

Pas besoin donc d’être un expert des questions géopolitiques, pour comprendre que ce retrait groupé va impacter sur le processus d’intégration qui présentait déjà pourtant des avancées considérables en Afrique de l’Ouest. Au moment où la Cedeao aspire à promouvoir la coopération et l’intégration économique sous-régionale dans la perspective d’une union économique, la perte de trois membres d’un coup va impacter sur ladite intégration. Tout d’abord, les personnes et les biens du Burkina, du Mali et du Niger n’auront plus la possibilité de circuler librement au sein des autres États de la communauté comme c’était devenu le cas. Ce qui aura logiquement un impact sur les échanges commerciaux qui s’étaient déjà affaiblis ces dernières années dans la sous-région suites aux tensions diplomatiques. Ne plus avoir accès à un marché comme celui du Nigeria par exemple, fort de plus de 200 millions de consommateurs, n’est pas une bonne chose pour le Niger, le Mali et le Burkina Faso.

Aussi, cette sorte de « Brexit ouest-africain » va davantage retarder l’implémentation de plusieurs de projets d’intégration en Afrique de l’Ouest où l’on aspirait à réduire les tarifs douaniers entre les pays, mais aussi à créer une monnaie commune. A l’échelle continentale, la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) nouvelle lancée ne sera pas épargnée.

Et les dégâts ne seront pas seulement économiques, mais pourraient également se faire ressentir sur le plan sécuritaire dans la mesure où l’organisation envisage des actions conjointes pour lutter contre le terrorisme par exemple. « Les pays comme le Sénégal ou la Côte d’Ivoire doivent se déployer afin de pouvoir contrôler les vagues extrémistes qu’on a vu dans certains de ces pays, afin d’avoir toujours les meilleures informations », explique l’économiste Abdoulaye Ndiaye. D’où le souhait de voir les différents protagonistes revenir à de meilleurs sentiments dans les plus brefs délais pour le bien de l’Afrique.

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