Outre la réduction des couts d’exploitation, ces structures vont être davantage compétitives et faire face à la concurrence selon le directeur de cette banque privée.
Née de la crise des banques dans les années 1980, la microfinance est aujourd’hui menacée d’extinction par la venue de nouveaux opérateurs, notamment ceux opérant dans les télécommunications, qui, du jour au lendemain, se sont investis dans le segment du transfert d’argent (mobile money). Pourtant, les Etablissements de microfinance (EMF) sont supposés s’occuper des couches sociales n’ayant pas accès au système bancaire classique, ou du moins, rejetées par ce dernier. Ceci à travers la promotion de l’épargne et l’éducation financière. Or, l’avènement du « mobile money » semble venir mettre à mal cet idéal. D’après les experts, il y a urgence à faire quelque chose au risque de les voir disparaître.
Pour n’avoir digitalisé leurs services, les EMF ont des coûts d’exploitation élevés. Ces structures « souffrent du coût de proximité parce qu’elles n’ont pas encore implémenté la digitalisation. Par conséquent, elles sont obligées de créer davantage des agences du fait du recours au manuel », explique Alexis Megudjou, ex patron d’EMF. Il s’exprimait au cours d’une conférence organisée à Yaoundé le 16 avril dernier par les étudiants du Master Banque et finance de l’Université catholique d’Afrique centrale (Ucac). Or, ces investissements sont susceptibles d’avoir des effets sur le coût des services offerts par les entreprises de microfinance. Pour les experts, le coût d’exploitation élevé va entraîner la hausse du coût du crédit. Cela pourrait mettre les clients dans l’incapacité de rembourser ledit crédit.
En effet, le « mobile money » est en passe de réaliser l’inclusion financière des différentes couches sociales au détriment des banques et des EMF d’après des experts spécialisés en finance. Le nombre de comptes mobile money est largement supérieur à ceux des banques et des EMF, apprend-on des sources autorisées. C’est pour cette raison que le Groupement interbancaire et monétique de l’Afrique centrale (Gimac) entend tout mettre en oeuvre pour « achever l’intégration de tous les opérateurs (financiers) de la sous-région Cemac », a indiqué Valentin Mbozo’o, son directeur général.
Pour Alexis Megudjou, directeur général du Crédit communautaire d’Afrique (CCA-Bank) autrefois EMF, les établissements de microfinance gagneraient à digitaliser leurs services. Selon lui, la digitalisation de leur « process » réduirait leurs coûts d’exploitation, tandis que leur sécurité est gage de la pérennité de ces structures. Toutefois, ces dernières sont appelées à y investir afin d’être à l’abri des cybercriminels. Ce que fait déjà CCA-Bank qui a mis l’innovation au coeur de son activité. In fine, la digitalisation va permettre au secteur de la microfinance d’être hautement compétitif, et de faire face à la concurrence actuelle face aux nouveaux acteurs. Par cette pandémie de Covid-19, il est plus que jamais temps pour les EMF d’emboîter le pas des banques classiques sur le chemin de la digitalisation des services. En le faisant, ces entreprises peuvent accroître le volume des transactions, et partant leurs bénéfices.
L’exemple de CCA-Bank
Créée en juillet 1997, le Crédit communautaire d’Afrique (CCA-Bank) a pendant longtemps, exercé en qualité d’EMF avant d’accéder au statut de banque classique. Une prouesse jamais réalisée par aucune autre EMF exerçant dans la sous-région Cemac. Au 31 décembre 2020, la banque compte un total bilan de 335 milliards de Fcfa, un encours ressources de 300 milliards de Fcfa, et un encours crédit d’un peu plus de 122 milliards de Fcfa. Depuis son accession au statut de banque classique au Cameroun, elle est passée de la 11ème position au classement national, à 9ème. En ce qui concerne la couverture géographique du territoire camerounais, elle est l’une des rares banques en activité dans le pays à être présente dans les 10 régions. Elle entre ainsi dans le top trois des institutions financières qui le font. Elle a mis 114.000 cartes en circulation. Ce qui fait forcément d’elle, un acteur clé de l’inclusion financière au Cameroun selon une structure d’analyse économique et financière indépendante. Une performance à mettre à l’actif de l’équipe dirigeante de la banque pilotée par Alexis Megudjou ; assisté de ses deux adjoints. C’est ce trio qui encadre les 570 employés de la banque dont 58% sont des femmes.